Trajectoire de Réchauffement de référence pour l'Adaptation au Changement Climatique




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Introduction

Adaptation Radicale (AR, https://adaptationradicale.org) œuvre depuis 2019 à rassembler et à soutenir psychologiquement les personnes qui acceptent la probabilité élevée des effondrements à venir, en grande partie liés au dérèglement climatique. L’idée de ce mouvement est d’anticiper pour mieux s’adapter au changement climatique, sans renoncer à l’atténuation, en agissant, expérimentant et apprenant ensemble et en tissant des liens avec d’autres initiatives, pour construire un futur désirable et pérenne.

AR se réjouit de voir (enfin) les acteurs politiques prendre la question de l’adaptation au sérieux et reconnaître que nous allons vers une trajectoire de +4°C en moyenne en France métropolitaine en 2100, et qu’au delà de l’atténuation, l’adaptation n’est plus une simple option, que faire face à ces défis sans précédents nécessitera de véritables stratégies de transformations et non des “rafistolages”, en d’autres termes “éviter l’ingérable ET gérer l’inévitable”.

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AR souhaite penser “un coup plus loin” et insiste sur le fait que la crise climatique représente une menace parmi de nombreuses autres intimement liées dans un ou plusieurs systèmes : crise de la biodiversité, des ressources et de l’énergie, crises migratoires et sociales grandissantes (guerres, émeutes), etc. Toutes ces crises rendent la probabilité d’effondrements de pans entiers de nos systèmes sociétaux trop élevée pour ne pas déjà s’y préparer, comme pour le climat, avec des mesures d’adaptation. L’adaptation est envisagée ici dans toute sa richesse conceptuelle, comme notion utilisée par de multiples disciplines notamment parce qu’elle interroge la manière dont doivent répondre les systèmes face aux changements de leur environnement, dont leur survie dépend. Nous voyons donc l’adaptation comme le terme choisi pour caractériser la réponse qui s’attache à la gestion des impacts des changements climatiques sur les territoires, les populations et les activités.

Le travail de rédaction de cette réponse au ministère de l’écologie nous a obligé à faire des choix : de quoi parler, mais surtout de quoi ne pas parler ?

Pour simplifier les choses, nous avons opté pour:
- nous baser sur les sources les mieux établies et référencées, pour ne pas prêter le flanc à la contestation
- rester au plus près de la question initiale, et des implicites de la trajectoire évoquée

Par exemple, la trajectoire d’une France à +4°C en 2100 suppose un monde qui continue à envoyer massivement du carbone dans l’atmosphère jusqu’en 2070, et donc qui ne connaît pas d’effondrement massif du système thermo-industriel dans les 50 prochaines années.

Nous avons donc dû laisser de côté la question des effondrements systémiques, qui est un élément important de notre réflexion, que nous développerons par ailleurs.


Question 1 : La France doit-elle se doter d’une trajectoire de réchauffement de référence d’ici la fin du siècle pour pouvoir s’adapter, tout en poursuivant la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre en ligne avec les objectifs de l’Accord de Paris ?


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Nous pensons en effet que prévoir l'adaptation est indispensable, les effets du changement climatique étant déjà visibles et inévitables jusqu’à la fin du siècle et au-delà : sécheresses, canicules, dômes de chaleur, incendies, inondations et tempêtes (orages, grêle, vents violents) vont être beaucoup plus forts, fréquents et répandus sur tout le territoire que ce à quoi nous avons fait face ces dernières années, qui ne sont qu’un début, puisque nous sommes à +1.2°C mondiaux, et que le GIEC ne prévoit aucun scénario possible où le monde ne passe pas à au moins +1.6°C mondiaux temporairement, pour ensuite redescendre à tout juste en dessous de 1.5°C, soit beaucoup plus chaud que maintenant.

L’adaptation comme nous l’envisageons c’est repenser notre société, arbitrer, attribuer des ressources actuelles à des préparations pour le futur, et envisager cela dans tous les secteurs, ce qui aidera en plus à faire réaliser au plus grand nombre que les mesures de réductions des émissions de gaz à effet de serre sont préférables, supportables et indispensables. De nombreuses mesures d’adaptation peuvent aussi être des « technologies sans regrets » comme planter beaucoup de haies, revégétaliser les villes, relocaliser et diversifier la production régionale de nourriture, les industries essentielles (médicaments…), etc.


Question 2 : Que pensez-vous d’une trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation de la France (TRACC) dont les niveaux de réchauffement de référence seraient : +2 °C en 2030, +2,7 °C en 2050 et +4 °C en 2100 (France métropolitaine) ?


C’est une trajectoire moyenne, elle correspond au scénario « current policies » du site Carbon Tracker, ou SSP2-4.5 des synthèses les plus récentes du GIEC. Nous pensons donc que c’est le minimum de prendre la trajectoire moyenne correspondant au monde tel qu’il serait si toutes les politiques actuellement en place étaient suivies sur les 70 prochaines années : pour l’instant, les politiques menant le monde à 1,5 ou 1,6°C ne sont pas en place dans les pays, et donc pas du tout en voie d’être suivies.

Nous souhaitons bien évidemment que tout soit fait pour maintenir la température aussi basse que possible et éviter une augmentation à +4 degrés. Il est donc impératif de faire le maximum en termes d’actions et ou de décisions politiques d'atténuation d'envergure en parallèle des mesures d’adaptation.
Mais le manque d'engagements rapides et les évolutions en cours que cela induit laissent hélas présager d'une trajectoire plus dramatique encore. Il nous semble donc logique et même important d'imaginer aussi une réelle trajectoire du pire, qui inclurait la possibilité de certains effets de dépassement de seuils (AMOC, Arctique, Amazone) et/ou une incertitude sur le comportement global des pays sur 75 ans de chaos climatique, et qui serait donc entre +4 et +5 en température moyenne mondiale, donc au moins +6 voire 7 °C en France, pour éviter que nos plans d’adaptation soient dépassés d’ici quelques années.

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Notre espoir est cependant que l’adaptation puisse devenir un accélérateur des politiques d’atténuation, une partie des solutions d’adaptation contribuant en plus à la réduction des émissions (comme la rénovation thermique ou l’agroécologie, par exemple).

Pour répondre plus en détail à la question 2, Adaptation Radicale France (ARf) a procédé à une synthèse des différents scénarios disponibles pour la France sur les horizons 2050 et 2100. Nous avons en particulier utilisé le fait que pour 2100, la température de référence de la TRACC se situe à peu près aux niveaux envisagés en 2050 selon le scénario du GIEC SSP5-8.5 (voir Fig. 1 )

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Figure 1 - Correspondances entre scénario de références du GIEC : le SSP5-8.5 amène un peu au-dessus de 2.5°C en 2050, soit un peu moins que le minimum de TRACC en 2100 (2,7°C à 3,2°C), à peu près représentée par le scénario SSP2-4.5

Suivant cette observation, les éléments de scénarios recensés dans le livre “France 2050, RCP 8.5 le scénario noir du climat” par Marc Lomazzi ont été analysés, et la synthèse ci-dessous provient très largement d’extraits de ce livre.

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En ne visant pas l’exhaustivité, mais simplement pour illustrer les effets d’un climat évoluant selon la TRACC, on peut détailler les effets attendus du réchauffement climatique prévus le long de 4 axes principaux :

1. Évènements extrêmes : canicules, sécheresses, incendies, inondations
2. Montée des mers : recul des côtes, inondations des villes et zones côtières
3. Futur de l'agriculture et de l’alimentation
4. Pertes de biodiversité et avenir des forêts françaises

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1. Évènements extrêmes : canicules, sécheresses, incendies, inondations


Les canicules sont déjà la première cause de mortalité dans des événements extrêmes : 80 % des morts dans les catastrophes naturelles le sont à cause de la chaleur. En 2100, suivant la TRACC, une bonne moitié de la France aura des extrêmes d'été plus chauds que la côte méditerranéenne en 1990. Montpellier est déjà passé d'un climat méditerranéen subhumide à un climat semi-aride. Plus au nord, la Lozère est passée d'un climat tempéré humide à un climat méditerranéen.

La France s'adapte déjà depuis 2003, mais comme on prévoit 2 fois plus de vague de chaleur en 2100 qu'en 1990, il y aura une augmentation des dégâts inévitable (en nombre de morts, d’un facteur de 2,5 environ, rapport du MedECC de sept. 2022).
En dehors des maisons de retraite, des hôpitaux ou des crèches, la climatisation électrique, qui refroidit l'intérieur mais rejette de l'air chaud à l'extérieur, devra être proscrite pour les usages privés, en ville en tout cas.

Et les vagues de chaleur n’auront plus le même niveau de base, ce qui affectera aussi les extrêmes : des pics à 50° sont sérieusement prévus et même 55° dans certaines régions. En 2100, en suivant la TRACC, une canicule comme 2003 se produira en moyenne tous les 3 à 5 ans ! Et si un dôme de chaleur arrive en France, alors ce sera selon Mathilde Pascal, épidémiologiste à Santé Publique France, un « saut dans l'inconnu, hôpitaux débordés, transports à l'arrêt, production d'énergie perturbée : une crise systémique ».

Des trois types de sécheresses (sécheresse météo : manque de pluie ; sécheresse hydrologique : manque d'eau dans les réservoirs, lacs, rivières et nappes phréatiques ; sécheresse agricole : manque d'eau pour les plantes par assèchement des 2 m de surface du sol), la sécheresse agricole est de loin la plus systémique dans ses effets, et la plus difficile à mitiger. Une large partie du pays présente déjà des sécheresses du sol sans vraiment de retour à la normale : la France dans sa moitié sud est en train de basculer dans un climat semi-aride, et selon la TRACC cela ne pourra que s’aggraver très sérieusement.

Même avec des pluies qui globalement pourraient se maintenir en France, l’évolution des sécheresses du sol sera plus rapide et plus forte que celle de la sécheresse météorologique (pluies), du fait de l'augmentation des températures.

Le Var, les Bouches-du-Rhône et les Pyrénées-Orientales connaîtront deux mois secs chaque année. La Corse, l'Hérault et l'Aude frôleront des périodes de cinquante jours sans la moindre averse.

Particulièrement touchée, l'Occitanie perdrait 180 millimètres de pluies par an, soit 30 % de précipitations en moins à Toulouse ! Dans l'ouest de la région, « les épisodes de sécheresse s'étendraient jusqu'à 40 % du temps». Presque partout ailleurs, environ 1 mois sans aucune pluie en été deviendra la norme . Les fleuves de France seront globalement entre -10% à -40% ou -50% de débit à travers le pays, et 60 % des nappes en permanence sous le seuil d'alerte sécheresse actuel.

Pour ce qui est des risques d’incendies, ils augmenteront globalement de 75 % selon la TRACC, avec une saison des incendies qui passera de 3 à 6 mois par an en 2100. En 2003 et 2022, années de canicules, les feux ont consumé 5 fois la moyenne annuelle. On a aussi déjà observé l’apparition des méga-feux en France en 2022 (Gironde et Côte d'Azur) : propagation à 10 km/h, auto-alimentation, ils sont incontrôlables par les pompiers. Le risque extrême d'incendie passera de 10-40 j/an dans le Sud-Est actuellement à 10-20 j/an dans la majorité du pays, et 80-100 en bord de Méditerranée et axe rhodanien.

Voilà donc le tableau de la France en 2100 dessiné par les climatologues si le thermomètre suit la TRACC : des chaleurs tropicales une bonne partie de l'année, les grandes villes, à commencer par Paris, transformées en fournaise deux à trois mois par an, et des brasiers consumant nos forêts six mois de l'année.

En ce qui concerne les risques d’inondation, les crues torrentielles devraient être doublées (+110%),et les crues par débordement augmentent encore plus, +130% sur la TRACC. En Bretagne, les pluies intenses seront multipliées par 4. Ailleurs, un simple doublement des crues torrentielles, de tous les 10 ans à tous les 5 ans, devrait rendre inhabitables certaines vallées alpines. Sur toute la France, les inondations "flash" devraient être multipliées par 5 et toutes ces inondations peuvent aussi, de plus en plus, affecter des sites industriels, dont certains classés à risque (ICPE et Seveso, dépôts pétroliers ou de gaz) et donc créer des pollutions accrues, plus fréquentes et nouvelles. Globalement, le coût des réparations suites aux crues par débordement devrait augmenter de +50 à +100%.

2. Montée des mers : recul des côtes, inondations des villes et zones côtières


Partout en France, et déjà de nos jours, des bouts de falaises partent à la mer sous l’effet de l’érosion accrue due à la montée des mers : Pointe du Hoc, Calvados - Wimereux, Côte d'Opale. Etretat, deux fois en 2 mois en 2022. Erretgia entre Biarritz et St-Jean-de-Luz en 2020... la liste peut être allongée à volonté : 20 % côtes Françaises sont en recul, de 10 cm à 8 m par an avec des pointes à 15m par an en certains points. Le bâtiment Le Signal, bâti en 1967 à la pointe de Grave (Médoc), était alors à 200 m de l'océan. Evacué en 2014, il avait les fondations quasiment dans l'eau avant d'être détruit en 2023.

Outre cette érosion, la montée des eaux va aussi inévitablement augmenter la fréquence et l’amplitude des « submersions marines », inondations venues de la mer et combinant l’augmentation du niveau de la mer et de grandes marées ou tempêtes présentant des dépressions aux valeurs exceptionnellement basses. Avec environ 1 m de plus pour le niveau des mers (ce qui est dans le domaine du possible avec +3°C mondiaux si on considère les dernières recherches sur l’instabilité des calottes glaciaires mentionnées dans le 6e rapport du GIEC, Chap. 9.3) et un coefficient de marée exceptionnel (120), le BRGM fournit des cartes très détaillées des zones inondées en France.

On découvre que dans ces conditions en 2100, 1,5 millions de français seraient touchés, avec Calais, Gravelines, Dunkerque massivement impactés.

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Figure 2 - Submersion marine entre Calais et Dunkerque selon projections du BRGM avec +1m de niveau des mers, niveau à risque en 2100 en suivant la TRACC

De grandes portions du Havre, Ouistreham, St Malo, St Nazaire, La Rochelle, Bordeaux, Bayonne seraient aussi recouvertes.

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Figure 3 - Submersion marine au Havre selon projections du BRGM avec +1 m de niveau des mers, niveau à risque en 2100 en suivant la TRACC

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Figure 4 - Submersion marine à Bordeaux selon projections du BRGM avec +1m de niveau des mers, niveau à risque en 2100 en suivant la TRACC

Mais des régions de basse altitude (côtes, estuaires, marais) seront aussi touchées encore plus massivement : même avec seulement 0,5 m de montée des eaux, ce qui est quasiment certain selon la TRACC, on observe l’inondation presque complète de la Camargue, ainsi que des Marais salants de Guérande, du Marais Poitevin, de 75 % de l’île de Noirmoutiers, 50 % de l’île de Ré, 30 % de l’île d’Oléron,... ainsi qu’une partie des côtes de la Baie du Mont St Michel et de la Baie de Somme.

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Figure 5 - Submersion marine de la Camargue selon projections du BRGM avec 0,5 m de niveau des mers : la Camargue disparaîtra régulièrement sous les vagues, ce qui détruira entièrement son écosystème actuel basé sur un mélange d'eaux douces et salées.

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Figure 6 - Submersion marine au nord de La Rochelle selon projections du BRGM avec 0,5m de niveau des mers : disparition du marais Poitevin (zone d’eau douce) et inondation régulière d’une moitié de l’île de Ré

Pour beaucoup de ces régions, on parle déjà de « repli stratégique », qui consiste simplement à… laisser la mer faire son œuvre et abandonner ces zones : le vieux Nice sera inondé plusieurs fois par décennie en 2100, et le repli sera la seule solution, comme pour la Camargue, les marais cités ou les estuaires de Dunkerque, du Havre ou de Nantes..

3. Futur de l'agriculture et de l’alimentation


La France métropolitaine, bien que dotée d'une incroyable diversité de terroirs et climats et d’une importante surface agricole, importe actuellement environ 50 % de sa nourriture. Cela la rend massivement dépendante des aléas de culture ailleurs dans le monde (voir les effets de la guerre en Ukraine sur certaines ressources alimentaires), mais en plus de cela, seule une très petite partie des plantes cultivées actuellement en France résistent à des températures supérieures à 40°C, qui vont pourtant devenir de plus en plus courantes en été. Il faut donc regarder 500 ou 1000 km au sud pour avoir idée de ce qui pourrait bientôt pousser en France.

On observe, de plus, une fuite en avant de l’agriculture qui devient de plus en plus souvent irriguée, alors qu’un agriculture respectueuse de l'environnement, de l'eau et en bio est possible et peut nourrir 530 M d'européens (Pierre Marie Aubert, Sciences Po Paris et AgroParisTech ), mais les deux modèles s'affrontent, la FNSEA ayant une vision presque complètement antagoniste, résumée par leur slogan « faisons de la lutte contre le changement climatique une opportunité économique pour les agriculteurs ».

Un rapport des experts des ministères de l’environnement et de l’agriculture observe déjà une envolée de la volatilité des prix mondiaux, un des multiples symptômes indiquant que des changements des pratiques alimentaires vont devoir se faire.

Dans un scénario élaboré par le CNRS et l’INRAE en 2022, « Génération Frugale », « le choc de la crise écologique subie a [...] fait émerger [...] en 2050 de nouveaux régimes alimentaires ». Pour l'essentiel de la population, les repas sont à base de produits bruts, de saison, peu transformés, les produits importés ont laissé place aux produits cultivés en France. Le jus de pomme a remplacé le jus d'orange, la consommation de café, de cacao et de fruits tropicaux a chuté... Dans cette France convertie à la frugalité alimentaire, « la consommation moyenne individuelle de viande est divisée par trois, celle de lait d'origine animale par 1,4. Les produits laitiers d'origine animale sont remplacés par des substituts végétaux. L'alimentation comprend ainsi une part plus importante de céréales, de légumineuses et de produits à base de soja qui procurent des protéines bon marché et faciles à stocker et à conserver ».

Ce genre de scénario émerge à l’échelle mondiale, un rapport dans The Lancet (Willett et al., The Lancet, 16 janvier 2019) le résume en une phrase. D'ici à une trentaine d'années, «la consommation mondiale de fruits, légumes, noix et légumineuses devra doubler et la consommation d'aliments tels que la viande rouge et le sucre être réduite de plus de 50 % », selon le nutritionniste Walter Willett, de l'université de Harvard, coprésident de la commission EAT-Lancet.

4. Pertes de biodiversité et avenir des forêts françaises


En ce qui concerne la biodiversité, le rythme actuel d’extinction est 10 à 100 fois plus élevé que lors des 5 extinctions de masses précédentes (incluant la météorite géante du Yucatan d'il y a 65M années qui a fait disparaître presque tous les dinosaures dans un cataclysme planétaire sans nom !)

Entre +2 et 3°C mondial (donc sous la trajectoire TRACC), jusqu’à 54 % des espèces terrestres et marines pourraient disparaître, ce qui veut dire que la survie des écosystèmes et la pérennité des services qu’ils assurent pour les humains n’est absolument pas garantie, vue la proportion énorme de disparitions possibles (espèces clé, extinctions fonctionnelles, etc).

En mer, déjà à +2° mondial, donc largement sous la TRACC et même avec un accord de Paris respecté, le GIEC indique que 98% des récifs mondiaux disparaîtront (½ Milliard d'humains en vivent directement).
Pour les forêts françaises, des changements majeurs sont déjà en cours, et les projections vers la fin du siècle indiquent un paysage forestier profondément modifié.

Les sécheresses de 2018-20 ont été les pires en Europe depuis environ 250 ans, et le climat est encore bien moins modifié que ce qui est attendu selon la TRACC en fin de siècle.

Le frêne, l'épicéa en plaine ou le châtaignier sont voués à disparaître de nos paysages d'ici à quelques décennies, et le risque pèse aussi sur les espèces emblématiques comme le chêne, le hêtre, le pin maritime.

D'ici 2050, 50% de la forêt française aura changé de visage, assure l’ONF, qui a calculé que les arbres morts depuis 2018, si leur troncs étaient mis côte à côte, couvriraient une surface équivalente à 30 fois Paris.

Plus de 50% des châtaigniers des Cévennes sont morts ou en dépérissement important. Même chose pour le cèdre et le chêne blanc d'Ardèche, le pin sylvestre des Vosges, l'épicéa du Jura. Dans l'ancienne forêt royale de Fontainebleau, un arbre sur cinq est en danger de mort.

En ville, vers 2050, le stress hydrique [...] devrait toucher 70 % des espèces d'arbres et d'arbustes, selon l’étude de Esperon-Rodriguez et al. publiée dans Nature Climate Change le 19 septembre 2022 .

Au pire, dans toute la moitié sud du pays, les forêts profondes tapissées de sous-bois pourraient laisser place à du maquis, des garrigues, voire des steppes dans les zones les plus asséchées. Partout ailleurs, les arbres seront plus chétifs, les forêts moins touffues. Il n'y aura plus de marronniers en France et on trouvera des oliviers jusqu'à Dijon. A la fin du siècle, la capitale historique du duché de Bourgogne sera, peut-être, plus réputée pour son huile d'olive que pour sa moutarde.

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Figure 7 - une illustration des changements prédits à l’échelle des paysages, issue du livre “France 2050, RCP 8.5 le scénario noir du climat” de Marc Lomazzi, Albin Michel

Autre aspect important et méconnu, le climat évolue bien trop vite pour les espèces végétales, leur capacité de migration naturelle ne peut pas leur permettre de s'adapter par elle-même : par exemple, la vitesse de colonisation par le chêne vert, estimée à 100 mètres par an, est cent fois trop faible pour suivre la progression du climat. Les performances de l'érable et du frêne sont encore plus médiocres.

Le premier ne progresse que de 3 mètres par an environ, le second parcours péniblement 50 centimètres par an.
Dans le cadre de son programme de « migration assistée » baptisé Giono*, l'ONF a replanté en Lorraine des chênes et des hêtres venus de Provence. Dans les Pays de la Loire, l'Office a planté des « Îlots d'avenir dans lesquels sont sélectionnées les essences qui pourront demain résister à un climat plus chaud et plus sec : séquoia, chêne pubescent, copalme d'Amérique...

Il n'y a pas de droit à l'erreur. Des choix effectués aujourd'hui dépend la forêt dont hériteront nos petits-enfants et nos arrière-petits-enfants. « Ce que l'on plante aujourd'hui, nous en verrons les bénéfices dans cent ans”, confirme Jonathan Lenoir, co-auteur de l’étude dans Nature Climate Change. “Le choix est compliqué. Si l'on plante, par exemple, des eucalyptus, qui poussent très vite et donnent de grands arbres très inflammables, on court le risque de feux de forêt gigantesques. C'est ce qui est arrivé aux Portugais. »


Question 3 : Quels outils et quel accompagnement technique et financier devraient être mis à la disposition des collectivités, des acteurs économiques et du public pour qu’ils puissent prendre en compte les impacts envisagés dans le futur du réchauffement climatique ?


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Les 4R de l’Adaptation Radicale


Guidée par des réflexions scientifiques et d’experts, l’approche d’Adaptation Radicale à notre situation invite à des conversations et des initiatives qui répondent à quatre questions. Nous proposons d’utiliser le cadre de réflexion des 4R comme un outil pour les décideurs, les collectivités et acteurs économiques et pour le public afin d’organiser les adaptations via l’implantation de politiques publiques fortes :

La Résilience : ce que nous devons ou pouvons garder, préserver et comment sauver ce que nous valorisons, ce qui nous est indispensable et qui permet de maintenir notre société et notre planète habitable ? Nous insistons ici sur le concept de résilience comme le fait de répondre au défi de la complexité, car ce terme est également souvent utilisé pour remobiliser les recherches associées à la géographie des risques et des catastrophes naturelles, et donc de traiter les changements climatiques au même titre qu’une problématique de gestion des risques. Traduit sur le terrain par les acteurs locaux, l’abus de l’utilisation du terme de résilience se matérialise par des réponses palliatives, souvent confinées à une liste d’actions pragmatiques mobilisant des savoir-faire situés dans la lignée du solutionnisme technique en place depuis plusieurs décennies. Cette vision technologiste et ingénieuriale s’effectue sans remise en cause de l’ordre social et politique établi, sans que ne soient discutés les liens entre la distribution des ressources, la pauvreté et les pouvoirs, et se développe au détriment d’une résilience plus sociétale fondée sur les principes de solidarité et d’éthique, condition critique d’une adaptation durable.

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Le Renoncement : ce que nous devons ou pouvons abandonner pour ne pas empirer la situation ? Notre Campagne Happy puis Joyeux Renoncement suppose, pour les individus et les communautés, l’abandon de certains avantages, comportements et croyances, car chercher à les maintenir ne ferait qu’empirer les choses. Comme, par exemple, la fermeture des installations industrielles vulnérables ou l’abandon de certains types de consommation. Le renoncement permet aussi de dégager des ressources (financières, énergétiques, humaines) pour la résilience sur les domaines choisis comme vitaux ou plus importants.

La Restauration : ce que nous devons ou pouvons retrouver, réimplanter, pour nous aider à relever les défis à venir. Cela implique que les individus et les communautés retrouvent des attitudes, des manières de vivre et des modes d’organisation laissées de côté par nos civilisations ultra-consuméristes et gavées aux hydrocarbures. Par exemple, rendre des terrains à la nature ; revenir à une alimentation saisonnière ; augmenter la solidarité, notamment par la production des biens et des services à un niveau communautaire, etc. De toute évidence, il est nécessaire de mettre en place au plus tôt une politique massive et radicale de transformation de l’agriculture et de restauration des écosystèmes. Et défaire soixante ans d’évolution du monde agricole sera une entreprise gigantesque. Il faudra de plus que nos efforts de conservation des forêts et milieux humides réussissent enfin après des décennies d’échecs, en dehors des réserves naturelles de portée géographique limitée.

La Réconciliation : avec qui, ou quoi, faire la paix pour nous aider à faire face aux difficultés et tragédies à venir, à l’heure où nous découvrons notre mortalité commune. S’appuyer sur l’intelligence collective par une recherche-action citoyenne pour pouvoir proposer des réponses radicales et des réflexions sur les manières d’adapter au mieux nos modes de vie (personnels et collectifs) tout en promouvant la solidarité et l’entraide, la non-violence, la gouvernance participative, l’inclusion et le droit de vivre en bonne santé et en sécurité, comme des valeurs humanistes essentielles, dans le respect de la planète et des “autres qu’humains”. Intégrer la justice sociale dans tout projet d’adaptation nous semble indispensable, pas de justice climatique sans justice sociale.

Soin interdépendant des êtres vivants, des écosystèmes et de leurs habitats


L’approche One Health est basée sur la prise de conscience des liens étroits entre la santé humaine, celle des animaux et l’état écologique de la planète. Elle développe la nécessité de décloisonner ces approches.
Une des stratégies d’actions est la diffusion de l’idée d’interdépendance et de co-bénéfices santé/environnement : il s’agit d’intégrer dans les choix et actions des stratégies d’adaptation au dérèglement climatique dans le soin ou l'habitat, dans notre alimentation ou nos déplacements, et surtout dans les décisions de politiques publiques, la santé et le bien-être des populations ainsi que ceux des écosystèmes.

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Ce concept revêt plusieurs aspects dont :
- Alimentation et agriculture raisonnées : plus respectueuses de notre santé et celle du vivant (développement d’une agriculture locale, alimentation plus équilibrée et végétalisée).

- Habitat : Conception et adaptation des lieux de vie et de travail pour améliorer la résilience aux aléas climatiques ainsi que la santé physique et mentale des habitants.

- Transports : décarboner nos moyens de déplacement pour diminuer la pollution et favoriser l’exercice physique pour améliorer la santé des populations.

- Approche intégrée, systémique et unifiée de la santé : par des collaborations entre acteurs de la santé publique, animale, végétale et environnementale.

Alimentation et Agriculture raisonnées
« Ce que tu manges te constitue de l’intérieur, et ce que tu manges dessine ton monde extérieur ». L’alimentation est à la fois centrale pour notre santé et détermine, via nos choix de régimes alimentaires, la production agricole et ses impacts sur l’environnement dont l’état influence aussi notre santé. A l’heure des pénuries dans un monde mondialisé, revoir notre consommation, renoncer à certaines pratiques agricoles pour retrouver notre souveraineté alimentaire semble indispensable. C’est aussi limiter les importations de matières premières agricoles qui soutiennent actuellement la production et l’élevage industriels. Cela aura un impact dans nos assiettes qui deviendront plus végétalisées.

Les biogéographies agricoles évoluent, les végétaux subissent de plus en plus de stress thermique et hydrique dépassant leur limite physiologique. Les agriculteurs tentent de s’adapter en changeant de variété, en modifiant le cycle cultural ou la date des semis. Mais ces stratégies ne suffisent pas, il faut changer de cultures et créer les filières adéquates. Ainsi, il est important de passer à l’action très rapidement, notamment à travers les aspects suivants :

Education et sensibilisation à l’impact de notre alimentation sur notre santé et celle de notre environnement
● Formation massive à l’agriculture paysanne respectueuse de l’environnement et des animaux, préparer et accompagner les acteurs dans la transformation du monde agricole et le renoncement à certaines pratiques/production plus compatibles avec un monde à + 4°C
● Aides financières et revalorisation des métiers agricoles
Favoriser l’entraide et la relation producteurs-consommateurs par la création d’un tissu humain et économique adéquat : depuis les approvisionnements agricoles jusqu’à la commercialisation des récoltes, la transformation, la distribution des produits alimentaires et les régimes alimentaires
● Investissement massif dans des cultures adaptées au climat à venir
● Déploiement de l’agrivoltaïsme pour concilier souveraineté énergétique et souveraineté alimentaire (sur des surfaces déjà artificialisées ou en friche et non en concurrence avec des surfaces nourricières).

Habitats
Pour s’adapter aux événements climatiques à venir, nous proposons les axes d’action suivants :
● Faire preuve de sobriété voire de renoncement dans la rénovation ou la construction de nouveaux bâtiments : tout doit être discuté au niveau territorial et national dans une optique de réponse aux besoins et doit être accompagné d’une acceptation de la réduction rapide et marquée de la proportion de nouvelles maisons individuelles.
● Massifier la rénovation énergétique globale et performante : cette rénovation doit cibler en priorité les logements les plus énergivores et les plus exposés aux températures extrêmes. Il serait aussi important d’envisager de transformer les logements pour les rendre plus adaptés aux fortes chaleurs (avec un co-bénéfice d’atténuation). L’ampleur des transformations à entreprendre à l’horizon 2050 impose une action organisée et vigoureuse.
Mutualiser et décarboner le chauffage des bâtiments publics et privés : développement des réseaux de chaleur permettant de mobiliser des gisements d’énergie renouvelable et de récupération : la biomasse (bois, résidus agricoles, cultures énergétiques), la géothermie, qui permet de récupérer la chaleur de nappes aquifères profondes, ou encore l’énergie de récupération issue d’usines d’incinération des ordures ménagères ou de sites industriels. Avec le développement des réseaux de chaleur urbains, les stockages de chaleur peuvent également être développés permettant par exemple de stocker un excédent de production venant du solaire thermique ou de l’électricité abondante en été, afin de le consommer en hiver.
● Mobiliser le bâtiment comme puits de carbone : baisse de l’utilisation par unité de surface des matériaux les plus carbonés et une augmentation de l’utilisation de matériaux bas carbone tels que les matériaux biosourcés.
● Passer de la bétonisation, responsable d’îlots de chaleur, à la perméabilisation (indispensable face aux pluies extrêmes), qui permet également de recharger les nappes phréatiques.
● Passer de la climatisation électrique (qui rejette de l’air chaud dans les centres-villes) à des techniques bio-climatiques naturelles de construction low-tech ; ainsi qu’à l’isolation et la végétalisation des bâtis et espaces ouverts, co-bénéfices pour la beauté des cadres de vie et pour la biodiversité. Réglementer la climatisation et son utilisation en la limitant par exemple aux pics de chaleurs.
Reboiser nos paysages avec des feuillus plus résistants aux canicules et au feu, et une diversité des variétés pour maintenir le cycle régénératif des forêts en apportant plus de résilience.
● Favoriser la renaturation du littoral pour s’adapter à la modification du trait de côte et la montée des eaux. C’est est une solution naturelle qui permet de limiter la construction ou le maintien d'ouvrage dur et d'augmenter la biodiversité.

Transports
● Renoncer aux modes de transport les plus polluants : voiture individuelle, avion.
● Favoriser principalement les mobilités actives (marche, vélo) et rendre attractif les transports en commun (abonnements complètement pris en charge et modulaires). Ce qui permet de lutter contre la sédentarité, qui, à son tour, favorise la baisse des taux d’obésité et de diabète.
● Transformation massive et rapide des voiries afin de laisser toute sa place aux modes de transport doux.
● Adaptation des transports aux personnes à mobilité réduite, aux familles, pour que les freins à leur usage soient drastiquement diminués.
Favoriser l’usage par rapport à la propriété d’un moyen de transport (véhicule partagé, covoiturage facilité…)
● Favoriser le télétravail et les lieux de travail collectifs pour limiter les déplacements (et mieux concilier vie personnelle et professionnelle).

Une approche intégrée, systémique et unifiée de la santé
Il est désormais établi scientifiquement que la qualité de vie et les facteurs environnementaux pèsent largement sur la nature et le développement des maladies comme sur les risques de décès. Il faut donc repenser le système de santé sur les bases de la prévention et d’une modification de nos comportements à l’échelle collective en se dotant d’outils comme le mutualisme; en abordant les problématiques de façon interdisciplinaire, en tenant compte des budgets des communes, l’examen des ressources des personnes dans les territoires (publics et privés, professionnel.les de la santé, chercheur.ses) et en intégrant aux processus décisionnels des citoyen.ne.s et des patient.e.s-expert.e.s.

Selon nous, la meilleure adaptation passe par le lien social de proximité et la mise en place dans chaque commune de lieux nourriciers ou maisons du lien qui se caractériseraient par :

Une agriculture nourricière locale, en circuits-courts : plus de santé pour le tissu économique comme pour les personnes qui mangent ce qui est produit.
Plus de liens, on connaît ceux qui produisent et moins d’impact environnemental (absence de pesticides, moins de transport).

● Des formations aux enjeux du dérèglement climatique, aux risques associés et aux moyens d’action pour y faire face et les mitiger (incendie, inondation, températures extrêmes etc). Formations spécifiques et adaptées aux métiers / responsabilités : professionnel.le.s de santé, les pompiers, les enfants, les enseignant.e.s, etc.

● Des lieux pour échanger et se rencontrer : un lieu pour s’alimenter (cantine solidaire et locale), lieu d’écoute et d’entraide (groupes de paroles, ateliers de réparation), de soins à l’autre (pôle de santé mentale et médicale et sport/entretien du corps), lieu de vie intergénérationnel (nous avons toutes et tous à apprendre les un.e.s des autres au delà des âges) qui proposerait des approches culturelles et festives pour faire place à la joie d’être ensemble (théâtre, danse, chant, lecture, peinture, dessin, musique…).

● Des temps citoyens réguliers, prévus et préparés avec la mise en place de partage de la connaissance (discussion thématique, conférence, visionnage de films, écoute de podcasts, mise à disposition d’ouvrages…) afin de rendre possible une prise de décision démocratique et éclairée, autant que faire se peut. (voir partie ci-dessous)

● Une gestion du lieu en gouvernance horizontale et tournante. Un des principaux défis sera de gérer la temporalité des adaptations et transformations nécessaires. Il sera primordial d’opérer par niveau de vulnérabilité afin de permettre la pleine santé du plus grand nombre en anticipant les tensions de certaines régions de la planète et l’accueil des réfugiés qui en résulte. L’importance de l’enjeu ainsi que sa complexité nous obligent. Il nous faudra prendre en compte les avis de toutes et tous, pour que chacun.e se sente concerné.e et investi.e.

Pour des communes en première ligne dans l’adaptation


Nous souhaitons remettre en première ligne la commune dans les processus d'adaptation, par l’implication active des citoyens et la mise à jour des dispositifs face aux nouveaux enjeux de l’adaptation et de la résilience.
Mais l’augmentation des responsabilités et de la technicité nécessaire seront des charges supplémentaires, à financer de manière stratégique.
Voir : https://www.i4ce.org/publication/adaptation-ce-que-peuvent-et-doivent-faire-collectivites-climat/

Mais le millefeuille administratif ne permet pas la facilité de compréhension des dispositifs réglementaires. La liste des acronymes rebute et au niveau local peu d'élus sont en mesure de les décrypter. Par conséquent beaucoup de dispositifs d'aides proposés ne sont pas sollicités.

Cahiers d’adaptation citoyens
Pour qu’une adaptation soit possible, que les changements demandés par cette adaptation soient consentis, nous proposons de mettre en place, dans chaque commune, des conventions citoyennes (regroupant des commerçants, les acteurs institutionnels, les associations, des citoyens, avec une composition par méthode de quota) qui auraient pour but de recueillir la parole des habitant.e.s au travers de cahiers d’adaptation citoyens.
Ces cahiers seraient rédigés à la suite d'une campagne d’information adaptée aux différents publics et auprès du plus grand nombre (écoles, collèges, lycées, facultés, écoles supérieures, MJC, Centres Sociaux, Maisons des projets etc) sur les différents risques inhérents au réchauffement climatique.
Ils recouvriraient les propositions des populations concernant :

● Les évènements extrêmes : Canicules / Sécheresses / Incendies /Pluies et inondations
● La Montée des mers : recul des côtes, inondations des villes et zones côtières
● Le futur de l’agriculture et de l’alimentation : types d’agriculture, résilience alimentaire, métiers agricoles/fonciers agricoles : distribution et répartition
● La préservation des forêts et de la biodiversité
● Le processus démocratique de la mise en œuvre des adaptations nécessaires.

La participation à cette démarche serait valorisée et encouragée (campagne publicitaire, émissions radiophoniques/télévisuelles, conférences et réunions publiques régulières). Les membres de ces conventions citoyennes seraient formé.e.s et accompagné.e.s par des employé.e.s municipales.aux exclusivement dédié.e.s à cette mission.
Une plateforme nationale et publique permettrait la saisie de ces propositions (effectuée par les employé.e.s municipales.aux). Elle serait ouverte et accessible (en lecture) à chacun.e. (traduction en langue des signes, enregistrement audio pour les malvoyant.e.s, traduction en différentes langues etc).

Après la fin du processus de recueil et de rédaction, un temps de traitement des données aura lieu et sera mené par un collectif tiré au sort (sur le mode de la convention citoyenne pour le climat).
Cette convention aura pour objectif de dégager les propositions d’adaptation qui seraient ressorties de manière majoritaire dans les cahiers citoyens avec, comme principale ligne de référence, l'intérêt du plus grand nombre.

PCS Plan Communaux de Sauvegarde
Les Plans Communaux de Sauvegarde sont des outils qu’on peut améliorer, par exemple en insistant sur l’importance que ces PCS soient en conformité avec la loi, et couvrent un spectre de risques large.
Le PCS est un outil de réaction à des évènements, à des crises, mais sa mise à jour annuelle invite à l’amélioration continue en plus d’une simple mise à jour des données liées à la population ou les moyens logistiques. L’un des objectifs de l’amélioration continue est de passer d’une approche curative (au mieux, réactive) à une gestion préventive et surtout proactive. L’amélioration continue aide l’organisation à identifier – en permanence – des marges de manœuvre, pour s’adapter et anticiper les évolutions de son environnement.
La loi Matras prévoit un PCS obligatoire pour certaines communes et communautés de communes. La gestion des risques ne devrait pas être optionnelle. Anticiper un risque comme la sécheresse ou la canicule ne devrait pas être optionnel.

Ces PCS doivent permettre de transmettre une culture de gestion des risques à la population. La gestion des risques n’est pas un vilain mot !


Conclusion


La tâche semble spectaculaire et le défi de l’adaptation crucial et déroutant.
Pourtant, une trajectoire claire et ambitieuse permettra de rendre ces réalités moins violentes et plus justes, surtout envers les plus vulnérables d’entre nous.
Penser à ne laisser personne sur le bord de la route, que ce soit pour le soin, pour l’alimentation, pour le droit à vivre librement ; penser ce demain, adapté “radicalement” aux nouvelles conditions d’habitabilité de la terre, nous oblige en tant que société.
A Adaptation Radicale, Les 4R nous aident à embrasser le monde et ses enjeux : Réconciliation, Renoncement, Restauration et Résilience, car nous pensons qu’un autre regard est nécessaire.

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S’adapter commence par sortir du déni et accepter que l’avenir sera plus hostile : moins d’eau, plus d’événements climatiques violents et difficilement prévisibles, de nouvelles maladies et pandémies, des conflits malheureusement également.
Si nous décidons au plus vite ,de se préparer collectivement, nous mettons un maximum de chances de notre côté pour éviter le pire et affronter au mieux les évènements à venir.
Pour ce faire, les solutions techniques ne suffiront pas et ne doivent pas nous détourner de l’objectif du vivre ensemble en toute sécurité : physique, sociale et alimentaire.

Il est urgent de ne pas nous fourvoyer, de ne pas perdre de temps car il est toujours plus précieux. Par exemple, éviter la concurrence entre les secteurs indispensables à notre survie : alimentation et production des énergies renouvelables avec la mise en place de l’agrivoltaïsme sur des terres agricoles.

Ne perdons pas de vue que l’argent, utile bien entendu, ne remplacera pas l’eau et la nourriture pour les populations quand elles viendront à manquer.
Nous avons plus que jamais besoin de démocratie, partout, pour prendre des décisions importantes qui puissent être comprises et acceptées. Sans l’adhésion des citoyens, tout sera plus difficile.

Et comme tout est systémique, nos adaptations doivent être menées sur tous les fronts simultanément : alimentation et agriculture raisonnées ; habitats résilients ; conseils citoyens/conventions citoyennes, cahiers d’adaptation citoyens ; simplification et optimisation administrative ; transports…

Nous, et particulièrement les pays occidentaux, devons être collectivement à la hauteur de l’Histoire.

Un travail collectif réalisé par
Lilas COURTOT, Daniel RODARY, Julien LECAILLE, Nadège PÉRINO-CHINCHIN, Alain GARCIA, Isabelle CLEP-GUETNY, Antoine GIANNINI, Yveline LE MOAL pour Adaptation Radicale

MAJ du 29/03/24